Bienvenue au Collège de Maisonneuve : l’histoire d’une mise en demeure

Par Sophie P.-Desmarais

Les opinions de l’autrice de cet article ne reflètent pas nécessairement celles du Trait d’Union.

Ayant plus de 7000 élèves, 21 programmes différents et étant au plein centre d’un quartier en plein essor, le Collège de Maisonneuve est un cégep reconnu pour ses programmes enrichis et ses installations sportives. Le collège dégage une allure formatrice et agréable.

Mais cette opinion est-elle unanime? 

La pandémie

La pandémie a été difficile pour plusieurs d’entre nous. Beaucoup ont dû s’habituer à de nouvelles circonstances. Quant au Collège de Maisonneuve, la pandémie a mis en lumière plusieurs aspects jusqu’alors méconnus.

Sidérée devant les nouvelles contraintes et techniques 

d’enseignement virtuel, l’administration a dû maladroitement s’adapter à cette pandémie. 

La différence entre notre cher collège et les autres écoles? Les autres ont pu s’organiser, s’entraider et s’assurer que cette maudite pandémie ne les enterre pas. À l’opposé, le Collège de Maisonneuve n’a jamais pu voir la lumière au bout du tunnel, et ne la voit pas encore à ce jour. 

La charge importante de cette nouvelle adaptation a haussé les tensions au sein de notre administration, créant un effet boule de neige qui s’est rendu jusqu’aux nombreuses fondations du cégep.

Les demandes d’incomplets refusées

Lors de cette fameuse pandémie mondiale, plusieurs d’entre nous ont connu des répercussions mentales. Anxiété, dépression, déprime –  la liste n’en finit plus, et les jeunes qui ont eu des diagnostics ont été nombreux.

Face à ce problème, le collège a reçu une grande quantité de demandes d’incomplet. Dans un cas comme celui-ci, l’administration devait examiner les demandes et prendre une décision selon la gravité de la situation. Bien souvent, lorsqu’un élève peut se justifier convenablement, sa requête est approuvée.

Pour beaucoup d’élèves au Collège de Maisonneuve, cela n’a pas été le cas.

Manque de justification, défaut de documentation : voici quelques-unes des excuses qu’a données le collège lorsque la demande d’incomplet a été refusée, même si l’élève présentait un billet médical. (Nous ne nommerons pas l’élève par souci d’anonymat.)

Un cas en particulier d’une élève au collège a été mis à l’avant lorsque cette dernière décida de communiquer avec l’administration afin de recevoir une justification du refus de sa demande. 

Après un « ping-pong » de messages, la première réponse venant de l’administration a consisté à dire que sa requête avait été envoyée après la date limite, une date n’apparaissant nulle part sur le réseau Omnivox ni sur le site Web du collège. La deuxième réponse a consisté à faire croire à l’étudiante que ses documents médicaux n’étaient pas valides.

L’étudiante a persisté en allant même rencontrer la direction en personne, mais pourtant, elle attend à ce jour, un an plus tard, qu’on approuve sa demande d’incomplet. 

Comment les élèves peuvent-ils compter sur l’appui de leur institution scolaire pour la réussite de leur formation si l’administration ne veut même pas reconnaitre leur souffrance?

Déficit et délaissement du personnel

Post-pandémie, une tendance actuelle a été clairement remarquée par l’ensemble des étudiants au collège : plusieurs professeurs et employés semblent quitter le cégep. À première vue, cela pourrait sembler relativement normal, mais cette tendance augmente de plus en plus à Maisonneuve.

Son effet sur les élèves

Un secteur en particulier qui a été touché par cet « exode » est l’aide psychologique et de travailleurs sociaux.  Ce sont des ressources qui sont supposées être disponibles pour les étudiants. 

Le centre d’aide aux étudiants (SAIDE), créé afin d’appuyer les élèves dans la préparation d’examens, est lui aussi débordé, n’ayant pas assez d’employés pour subvenir aux besoins.

Le manque d’écoute

Ayant exprimé leurs préoccupations face à la gestion administrative auprès de leur syndicat, les professeurs ont dû se révolter contre des membres de la direction. Ils ont réussi à accomplir leur objectif et à faire passer le vote afin de renvoyer certains visages de l’administration. 

Ça n’a été que quelques jours plus tard que les enseignants ont découvert que la décision avait été renversée, suspendant la résolution des professeurs. On avait donc décidé d’ignorer la demande générale des enseignants.

La liste d’offres d’emploi

D’après Emploi CÉGEP, au mois d’avril 2023, plus de cinquante jobs étaient disponibles au Collège de Maisonneuve. Cela veut dire que durant cette session d’hiver, cinquante différents postes ont été délaissés.  

À première vue, ce nombre peut sembler petit face aux 7000 élèves qu’héberge l’école, mais ce nombre incroyable d’emplois disponibles est bel et bien immense.

Le Collège Dawson, une énorme école anglophone ayant une très bonne réputation, a offert le même nombre de programmes et a eu le même nombre d’étudiants. Dawson, par contre, semblait seulement nécessiter le dixième du nombre d’employés manquants à Maisonneuve afin de combler tous les postes essentiels.

Donc pour chaque offre d’emploi que présente le Collège Dawson, dix autres postes sont inoccupés à Maisonneuve. 

Qu’est-ce qui explique donc ce manque d’employés au Collège de Maisonneuve? Est-ce normal que plusieurs employés du cégep démissionnent pour rejoindre un autre poste rémunéré au même salaire, mais à un lieu différent?

La construction et les lieux communs

Si vous êtes des habitués de l’île de Montréal, vous êtes donc habitués aux bruits de marteaux-piqueurs. Malheureusement, les élèves à Maisonneuve sont aussi habitués à ces magnifiques bruits dérangeants.

En passant par la cafétéria et le jardin intérieur, pour enfin ne jamais terminer de réparer les escaliers roulants, la construction au Collège de Maisonneuve ne semble jamais achever.

Ne venons-nous pas juste d’avoir une pandémie nous empêchant de nous déplacer au Collège? Le manque de « timing » face aux travaux est incompréhensible et injustifié, d’autant plus que plusieurs lieux communs sont fermés sans préavis.

En effet, ayant autant d’élèves, les endroits pour étudier ou manger sont déjà limités, et les aires en construction ne font que rajouter de l’huile sur le feu.

L’exemple du café étudiant en est un bon, puisque ce dernier a été transformé en salle de « spinning » sans avertissement. Cette salle est maintenant utilisée à des fins monétaires pour le collège, pour deux raisons : 1) le cégep reçoit l’argent lorsqu’on loue l’espace de l’ex-café étudiant et 2) le cégep a une exclusivité sur la cafétéria maintenant que le café étudiant ne lui fait plus compétition. De plus, la nouvelle transformation du café étudiant était utilisée par les équipes d’improvisation, qui ont été contraintes de trouver un nouvel endroit pour pratiquer.

Au prix que paient les étudiants et les contribuables de la communauté, ne devraient-ils pas bénéficier d’un meilleur environnement d’apprentissage?

Prendre le problème en main!

« Un collège reconnu pour la qualité de sa formation et constamment en marche vers la réussite éducative de ses étudiants. »

Après avoir enduré absurdité après absurdité, l’association étudiante a décidé de prendre le taureau par les cornes. Six élèves ont composé, imprimé puis distribué un tract aux plus récentes portes ouvertes, décrivant les nombreuses failles du Collège. 

Ayant le droit, en tant que membres exécutifs de l’association étudiante, de partager l’opinion et de promouvoir les intérêts des étudiants du Collège de Maisonneuve, ces élèves ne s’attendaient pas à recevoir des menaces aussi insensées.

Ce tract a été saisi par des employés de l’administration, qui ont ensuite envoyé une mise en demeure à l’association étudiante, par crainte de diffamation envers le collège. Les élèves ont aussi reçu des menaces personnelles de notes au dossier.

Malgré l’appui des professeurs de sciences sociales, le problème s’est lentement dissipé, mais la rage étudiante reste tout de même dans l’air.

Que dire de cette censure? Que penser de la manière dont collège traite ses étudiants et ses employés? 

Les élèves ont montré leurs efforts et leur mécontentement face à la façon dont le Collège de Maisonneuve gère les préoccupations des étudiants. Espérons que cela incitera l’administration à être plus réceptive aux préoccupations des étudiants et à travailler en collaboration avec eux, au lieu de se cacher la tête dans le sable.