La folie artistique

Un essai de KidaLauzia Paquette

Illustration par piu (@piu_q8 sur Instagram)

Précision : L’auteure, ainsi que le comité du journal étudiant, ne corroborent pas l’idée qu’avoir un problème mental soit égal à la folie, bien que le texte puisse sembler ainsi. L’auteure ne s’est basée que sur les pensées de l’époque (quand Basquiat ou Van Gogh étaient considérés fou par exemple) et non pas les pensées modernes.

Dans le cadre d’un de mes cours, j’ai assisté à l’exposition sur Basquiat au Musée des beaux-arts. J’avoue avoir été très choquée par les œuvres qui m’ont été présentées. Que ce soit les couleurs ou les formes, le message ou les mots, tout me semblait presque fou. Puis, j’ai entendu quelqu’un derrière moi s’exclamer : « Il est donc bien fou, lui! » Cette simple phrase m’a fait réfléchir encore et encore. D’une part je ne pouvais qu’être d’accord avec cette phrase, pourtant une part de moi n’a pas pu s’empêcher de penser : la folie n’est-elle pas simplement une caractéristique d’artiste?

Prenons par exemple Vincent Van Gogh, qui s’est coupé l’oreille et s’est suicidé, ou encore Edvard Munch qui souffrait d’intenses cauchemars et visions horrifiques. Louis Wain, connu pour ses tableaux de chats, souffrait de dépression et de schizophrénie. Un autre exemple est Francisco Goya, qui souffrait probablement du syndrome de Susac, « une affection rare caractérisée par une occlusion des petits vaisseaux qui drainent la rétine, l’oreille interne et le cerveau »1 ou de démence paranoïaque. Bien entendu, la liste d’artistes étroitement liés à la folie est encore très longue. Ainsi, plusieurs artistes, peu importe l’époque ou le courant, souffraient ou étaient proches de la folie.

Mais jusqu’à quel point peut-on comparer folie et artiste? Et surtout, est-ce que cela veut dire que quelqu’un sans problème psychologique ne peut pas être un bon artiste? 

« Il n’y a point de génie sans un grain de folie », a dit Sénèque, citant Aristote. Selon cette citation, on comprend que tout grand artiste tel que Basquiat, Van Gogh ou le Caravage avait nécessairement un lien avec la folie. Mais par quoi pouvons-nous exactement reconnaître la folie? Quelle est la ligne entre folie et raison? Qu’est-ce qui les différencie?

Le dictionnaire définit un ‘fou’ comme quelqu’un qui « a perdu la raison, qui est atteint de troubles mentaux » ou encore quelqu’un « dont le comportement est extravagant, déraisonnable, imprudent ou malavisé ». La folie peut notamment se manifester sous forme d’hallucinations. Ces mêmes hallucinations génèrent donc une perception du monde différente de celle des autres. Prenons maintenant Basquiat en exemple : mère allant d’institutions psychiatrique en institutions psychiatriques, consommations de drogues en plus de côtoyer d’autres personnes atteintes de maladies telle que son ex Madonna souffrant d’un trouble bipolaire ou son ami Andy Warhol qui souffrait de syllogomanie… On voit donc que Basquiat était lui aussi lié indirectement à la folie.

Nous avons donc fait le point entre l’artiste et la folie, ce qui valide la citation de Sénèque. Mais est-ce que cela veut dire que quelqu’un ne souffrant de rien ne peut pas devenir un bon artiste? Je ne crois pas, non. Certaines autres maladies semblant plus « banales », comme l’anxiété, peuvent également amener la personne atteinte à avoir une perception différente de la réalité, un univers où se cacher. Toutefois, même sans anxiété, je crois qu’il est très possible d’être un artiste sans être considéré comme « fou ». Un auteur ne devient pas nécessairement auteur à cause d’une dépression, mais bien en lisant toujours plus de livres, tout comme un peintre peut peindre sans rêver de démons. En fait, un bon peintre est, selon moi, quelqu’un qui est capable d’aller non pas dans un univers imaginaire, mais bien au plus profond de lui, de la même manière qu’un poète s’inspire de sa propre personne.

En conclusion, le lien entre artiste et folie est indéniable. Pourtant, la folie ne définit pas l’artiste, c’est l’artiste lui-même qui définit la folie selon ce qu’il pense, ce qu’il voit ou ce qu’il imagine. Bref, selon son univers. Ainsi, il est bien possible d’être un bon artiste sans souffrir de maladies mentales.

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